Une aurore en été…

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24 août 2015. On se promène à Stockholm. Un peu de vent, 23°C, et deux navires hors du commun : le Vasa et le Tara.

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Le Vasa était censé être le navire amiral de la flotte suédoise mais il a chaviré dès sa première sortie, en 1628, devant le tout Stockholm venu l’admirer. Le bateau était mal équilibré et tant mieux, car cela permit, trois siècles plus tard, de sortir de la vase l’unique exemplaire restant au monde d’un bâtiment de cette époque.

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L’autre voilier d’exception est une goélette en aluminium qui sillonne les mers ou se laisse dériver avec les glaces arctiques au gré des projets scientifiques qu’elle accueille. Le Tara revient de 3 ans d’expédition pour l’étude du plancton ; le capitaine qui nous fait aimablement visiter le bateau est fier que ce projet ait été consacré par un numéro spécial de la revue Science. Tara fait escale à Stockholm avant Londres, puis Paris pour la COP 21, où il servira de quartier général aux ONG protégeant les océans.

Difficile de passer ici sans s’intéresser à la mer et à ce qui navigue. À Stockholm, l’eau est une extension de la terre : la ville s’est développée sur plusieurs îles et l’on passe de l’une à l’autre en bateau-bus, avec sa carte de transports en commun.

Il ne faudrait pas oublier le ciel pour autant. Quelques jours auparavant, le soleil s’est attaqué à notre magnétosphère, élevant le kp au niveau 5. Rien ne dit que ces temps-ci, on ne va pas avoir droit à un petit quelque chose…

Le 27 août, on part se balader à Gällnö, une île de l’archipel, à deux heures de Stockholm. Nous voilà un peu éloignés des lumières de la ville.

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Les prévisions annoncent du niveau 4 pour ce soir. Ce n’est pas beaucoup pour le sud de la Suède, mais on va quand même jeter un œil. Frontales sur la tête, on part à l’aventure, direction le nord. Entendons par là : un petit kilomètre de marche dans les bois, qui débouche sur un champ bordant la mer. Tout est calme, les stratocumulus s’entassent, les cumulus défilent, aucune étoile en vue. On rentre dormir à l’auberge.

Le lendemain, 28 août, les prévisions s’améliorent. Ce soir : kp=5. Au début, on se dit qu’on profitera de l’aurore sur le bateau qui nous ramènera à Stockholm : 2h de traversée de 21h à 23h. À Stockholm, on cherchera un endroit propice, proche de l’embarcadère, pour voir la suite du spectacle. C’est le plan initial.

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Dans la journée, pour voir un peu autre chose, et surtout pour s’adapter aux horaires du bateau, on change d’île : on passe de Gällnö à Grinda, bien plus petite. On y pose les pieds vers 17h. À 17h30, on y prend un café, et à 18h15, on attaque le buffet de barbecue, en regardant les bateaux s’amarrer au port pour la soirée. Ici, il n’y a pas de catway, mais des corps-morts auxquels il faut attacher la poupe afin que la proue ne tape pas contre le quai. Les touristes que nous sommes ne perdent rien des manœuvres des divers équipages.

La suite est une heureuse question de couvertures et de bâche. Il est 20h, le soleil est encore au-dessus de l’horizon, les cumulus se dégonflent, et les prévisions sont toujours belles. On a une heure et quelque devant nous avant de regagner l’embarcadère sud pour prendre le bateau direction Stockholm, alors nos pas nous mènent vers le nord de l’île, qui fait 1,5 sur 2 km.

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C’est la fin de la saison, on traverse un terrain de camping désert. À côté d’une table en bois, traîne un beau tapis de sol en polypropylène en très bon état. Ce n’est pas une occasion à laisser filer, et le plastique, c’est mauvais pour la nature. Dans le sac, le tapis de sol. Un peu plus loin, une couverture en polaire est abandonnée par terre. Jamais on ne la ramasserait, sauf qu’on est à l’étranger, qu’il y a un dessin étonnant dessus (Solstickan), et qu’on se dit que ça nous fera un souvenir…

Au bout du chemin, un embarcadère donne sur la mer et sur le nord. Vue assez dégagée : les sapins de l’île d’en face ne sont pas tout près. On se dit qu’en cas d’aurores, ce ne serait pas mal, sans doute mieux que le bateau. Que fait-on ? On n’a pas de sac de couchage, mais il y a un abri en bois fermé sur trois côtés et on possède, depuis peu, un tapis de sol et une couverture en polaire. On reste. Tant pis pour le bateau du retour, on verra bien. Au pire, ça fait une nuit blanche au frais. Voilà quinze ans que je n’ai pas fait ça.

Pourquoi raconter ces détails ? Pour souligner que si, quelquefois, les aurores nous tombent dessus sans prévenir, la plupart du temps, c’est mieux d’aider un peu la chance…

Le soleil se couche. On est en été, on n’a jamais vu d’aurore boréale en été, mais on sait que c’est possible. Il suffit d’être suffisamment bas en latitude pour qu’il fasse nuit, et que ce soit suffisamment fort pour que les aurores se voient dans des latitudes basses.

À 22h, une lueur se distingue. Paresseux que je suis, je fais une photo à main levée pour voir si c’est vert ou non.

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Verdict : près du lampadaire éteint, c’est vert. Très faible, mais vert. On n’y voit presque rien sur la photo, mais on est heureux : c’est la première aurore qu’on voit en cette saison, et la première depuis… mars, en France. En fait, on est relativement gâté, mais on est content quand même, et on reste aux aguets pour la suite…

À 22h12, très rapidement, ça se réveille franchement.

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On se retrouve, comme deux gamins, à regarder le ruban se déplacer de gauche et de droite. Les dernières fois qu’on a vu ça, il faisait froid, ça relevait de la petite expédition. Là, il fait quinze ou seize degrés, on est au milieu d’un archipel tout calme, et le ciel se donne quand même à nous. Le bateau sur lequel on devrait être est en route pour Stockholm, et on réalise que le pont éclairé doit poser un problème de pollution lumineuse, et qu’on est vraiment bien sur notre bâche et notre couverture de récupération, à l’écart de tout ce qui brille.

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Vers 22h30, apparaît sur une photo quelque chose qu’on ne voit guère à l’œil nu, ce soir-là, peut-être à cause de la pleine lune. Des rayons violets surplombent les lumières vertes. Les instruments indiquent kp=6…

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Ensuite, ça se calme. Le niveau 7 annoncé n’arrive pas, le sommeil commence à gagner du terrain. Comme on est quand même assis sur le 59e parallèle, on continue de scruter le ciel, mais ça relève plus de l’espoir que d’autre chose.

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La fidèle Grande Ourse est là, qui suit depuis l’enfance chaque Terrien de l’hémisphère nord…
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Vers 23h10, un dernier sursaut anime le ciel. Un voilier passe par là, poussé par un reste de vent, doux, mais constant…
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